Dr.Mohamed Benomari
Une bonne nouvelle diplomatique, qui doit s’inscrire dans une réflexion plus ample sur le système international d’alliances
Le Président français Emmanuel Macron arrivera le lundi 28 octobre 2024 à Rabat, pour une visite d’Etat de trois jours, à l’invitation du souverain marocain Mohammed VI.
Le 30 juillet dernier, Emmanuel Macron reconnaissait le plan d’autonomie marocain comme « la seule base pour aboutir à une solution politique juste et durable » au Sahara occidental et la souveraineté du Maroc sur la région.
En se rendant à Rabat en visite d’État du 28 au 30 octobre, il entend mettre un terme à la crise aiguë qui a opposé les deux pays pendant trois ans et relancer une dynamique positive. S’il s’agit d’une bonne nouvelle diplomatique, qui s’inscrit dans une réflexion stratégique plus ample sur le système d’alliances :
Cette reconnaissance, donne un nouvel avantage au Maroc après la reconnaissance de sa souveraineté sur le Sahara marocain par les Etats-Unis en 2020, l’Espagne en 2021 et l’Allemagne en 2022. Et elle contribue à isoler encore un peu plus l’Algérie, dont les relations sont rugueuses, chaotiques ou difficiles avec beaucoup de pays européens.
Mais si cette reconnaissance française, à la suite des autres, a d’indéniables effets sur le rapport de force régional, elle invite à élargir la focale en s’interrogeant sur le contexte international dans lequel elle s’inscrit.
Ce contexte, c’est celui d’un monde instable et fracturé, d’un monde qui se complique, dans lequel les appétits ne se cachent plus et la guerre entre États a fait son retour.
Cette multipolarité signifie un vrai désordre et fragmentation du monde, sur fond d’affrontement de blocs. Le sommet des BRICS de Kazan prouve que l’heure est aux convergences et aux soutiens appuyés.
Importance stratégique du Maroc dans l’Atlantique en matière de Sécurité, du commerce et de l’énergie
Une nouvelle « guerre froide » qui prend forme dans les combats en Ukraine, au Moyen Orient et demain peut-être dans le détroit de Taïwan, chacun sera sommé de choisir son camp et les systèmes d’alliances redeviendront cruciaux.
C’était le sens des accords d’Abraham, signés en septembre 2020 entre Israël, Bahreïn, les Émirats arabes et le Maroc. Si la dynamique a naturellement été interrompue par la situation créée par le 7 octobre au Moyen-Orient, dont « il est trop tôt pour affirmer qu’elle est définitivement compromise », souligne Jean-Thomas Lesueur, directeur général de l’Institut Thomas More.
L’accession du Maroc au rang de première puissance régionale.
Le Maroc le seul pays stable du Maghreb
Sur le flanc sud, le Maroc, devra tenir une place singulière. Seul pays stable du Maghreb et des rivages de l’immense océan sahélo-saharien, il constitue une plaque incontournable sur des mondes en ébullition, traversés de tensions et de menaces :
À l’Est de la Méditerranée, le Moyen-Orient vit au rythme de la rivalité entre Israël et l’Iran et son éventuelle déflagration consécutive à un conflit ouvert aurait d’importants effets au Maghreb et dans le bassin occidental de la Méditerranée.
La Libye est devenue un condominium russo-turc aux portes de l’Europe. La Tunisie s’enfonce dans une lente glaciation autoritaire.
Quant à l’Algérie, l’immobilisme ne saurait occulter l’usure du système politique.
Sur ses frontières méridionales, le Maroc est confronté aux risques et aux menaces de la zone sahélo-saharienne, zone de tous les dangers. Mais le Maroc, vaille que vaille, s’emploie à renforcer ses frontières, freinant ainsi la remontée vers le nord des migrants subsahariens.
Ce rapide tour d’horizon montre un fait nouveau : l’accession du Maroc au rang de première puissance régionale. Dans un système d’alliances à rebâtir et à raffermir, cela multiplie les potentialités d’une entente renforcée entre la France et le Maroc.
Des « séries de feuilles de route ambitieuses »
Le Maroc constituer un hub entre l’Europe et l’Afrique
Selon l’Elysée, cette visite d’Etat aux enjeux divers devrait par ailleurs permettre de « renforcer la coordination politique » entre Paris et Rabat et plusieurs accords seront signés, lundi 28 octobre dans le secteur de « l’eau, l’énergie, l’éducation, le capital humain, la sécurité intérieure, et en matière d’enseignement supérieur et de recherche, en matière d’éducation, en matière d’innovation et de culture, dans le cadre d’une francophonie de valeur ».
Souhaitant inscrire cette « dynamique dans la durée », l’Elysée affirme vouloir é Selon l’Elysée, cette visite d’Etat aux enjeux divers devrait par ailleurs permettre de « renforcer la coordination politique » entre Paris et Rabat et plusieurs accords seront signés, lundi 28 octobre dans le secteur de « l’eau, l’énergie, l’éducation, le capital humain, mais également la sécurité intérieure ».
« Notre objectif est de pouvoir travailler à soutenir notre souveraineté respective : souveraineté économique, énergétique, sanitaire, et donc nous allons pouvoir illustrer cette complémentarité à travers des feuilles de route qui tracent une ambition pour l’avenir et de grands projets en commun » précise la présidence française.
Alors que le Maroc accueillera prochainement la CAN 2025 et la Coupe du Monde en 2030 avec l’Espagne et le Portugal, la France entend « accompagner le Maroc dans son ambition » de faire de ces évènements « de grands succès ».
Paris, qui considère que « le Maroc a vocation à constituer un hub entre l’Europe et l’Afrique », estime avoir « une série de convergences et de complémentarités qu’il s’agit de dessiner en s’appuyant sur une série d’initiatives ».
Le dossier du Sahara marocain évoqué
Le porte-parole de l’Elysée a assuré que la visite d’Emmanuel Macron sera l’occasion « de réitérer » la position de la France et de son soutien à la souveraineté du Maroc sur son sahara. « Il est évidemment important pour nos amis Marocains que nous confirmions notre attachement à cette question essentielle pour leur sécurité nationale et ce sera le cas », est-il précisé.
A ce stade, la présidence assure qu’il est prévu de « travailler à la partie d’opérationnalisation de cette position » et que la France « est prête à accompagner le développement économique de ces régions au bénéfice des populations locales et conformément au droit international ».
Pour rappel, dans une lettre adressée au Roi Mohammed VI à l’occasion du 25e anniversaire de son accession au trône, Emmanuel Macron a annoncé qu’il considérait « que le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine ».
« Pour la France, l’autonomie sous souveraineté marocaine est le cadre dans lequel cette question doit être résolue. Notre soutien au plan d’autonomie proposé par le Maroc en 2007 est clair et constant », a-t-il poursuivi ajoutant que ce plan « constitue désormais la seule base pour aboutir à une solution politique, juste, durable et négociée, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations-unies ».