Interview avec la poète Noria Yamna Elaimani

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Interview par : Ahmed El Hammoumi

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« Quand j’écris, je ne pense pas à mon genre, au contraire c’est le moyen pour moi d’en sortir et de me connecter à mon être qui est, lui, asexué, je me relis à l’Humain » nous déclare Noria Yamna EL AIMANI, poète marocaine francophone qui vient de publier son recueil intitulé « Au seuil de ma mémoire » Aux Éditions du Panthéon à Paris.

Enseignante et formatrice de formateurs à l’enseignement du français langue étrangère, Noria Yamna EL AIMANI passionnée de pédagogie et de didactique s’est formée à travers un cursus universitaire dans différentes universités françaises : Michel de Montaigne Bordeaux III, Stendhal Grenoble III et l’Université d’Artois à Arras.

Malgré sa réticence à l’exercice médiatique Noria Yamna EL AIMANI a accepté de répondre à nos questions concernant son premier recueil et ses projets à venir

A.E : Vous venez de publier un recueil de poésie intitulé « au seuil de ma mémoire ». Pourriez-vous expliquer au lecteur la signification de ce titre ? Et puis que représente pour vous la mémoire ?

N.Y.E : Ce titre résume tous les poèmes de ce recueil. J’ai eu besoin à un moment de ma vie d’interroger mon passé, de me souvenir et la poésie s’est imposée à moi comme un des moyens d’y parvenir.
Je pense que j’ai eu besoin de le faire comme on a besoin de s’arrêter sur une aire d’autoroute, pour se rendre compte du chemin parcouru et du chemin qui reste à faire. Se ressourcer et ressourcer son moyen de locomotion. Oui la mémoire pour moi est cette aire où on prend le temps de se reconnecter à son passé à ses racines pour mieux préparer l’avenir.

A.E : Certains de vos poèmes sont consacrés à la thématique de la mort, pourriez-vous nous parler des liens que vous tissez entre l’écriture et la mort notamment dans le contexte d’une pandémie mondiale ?

N.Y.E : C’est une question complexe mais qui je pense peut avoir une réponse simple. La mort fait partie de la vie, elle est l’acte final de la pièce que chacun de nous est venu jouer sur cette terre. D’ailleurs on dit bien « Il/elle a tiré sa révérence » pour annoncer d’une manière imagée le décès de quelqu’un. La pandémie n’est qu’un des nombreux décors de cette pièce que nous jouons tous. L’humanité à travers son histoire a été très inventive pour créer des situations de départ massifs vers l’au-delà, les guerres, les pillages de la nature…

A.E : Que signifie pour vous être une femme écrivaine francophone au Maroc ?

N.Y.E : Une question à tiroirs. Alors une femme écrivaine ? En ce qui me concerne quand j’écris, je ne pense pas à mon genre, au contraire c’est le moyen pour moi d’en sortir et de me connecter à mon être qui est, lui, asexué, je me relis à l’Humain. En ce qui concerne le fait d’écrire en français alors que je suis marocaine, cela a longtemps été très compliqué pour moi. J’en ai éprouvé une certaine honte, je l’ai vécue comme une trahison envers ma langue maternelle, envers mes origines. Je refusais de voir que le parler et l’écrire était le rêve de tous ses détracteurs. Finalement, j’ai compris la fascination des dominés pour la langue des dominants. Maintenant, j’ai accepté le fait d’être publié dans cette langue car je n’en ai pas d’autres pour m’écrire étant donné que ma personnalité est structurée en français.
Et l’âge aidant, on comprend que la langue n’est qu’un moyen pour exprimer l’Humain quelle que soit sa langue, sa nationalité.

A.E : Vous écrivez de la poésie mais aussi des nouvelles. Quel genre littéraire vous permet de vous exprimer le mieux ?

N.Y.E : Je pense que chaque genre offre un moyen différent de s’exprimer. Si la poésie ouvre tous les champs des possibles pour l’interprétation, la nouvelle, elle, est plus directive dans la mesure où elle raconte une histoire courte mais percutante souvent. Le choix de m’exprimer à travers un de ces genres reste tributaire du moment vécu. La poésie me permet de me plonger dans mes émotions, de les accueillir et de les comprendre. Les nouvelles m’aident à comprendre le monde extérieur. Chaque genre a pour moi son utilité.

A.E : Avez-vous un projet culturel et littéraire ? Quel but assignez-vous à votre écriture ?

Deux questions en une. Je vais d’abord répondre à la première partie. Oui, j’ai le projet d’écrire un roman plus ou moins autobiographique, à travers lequel, je souhaite témoigner de toute une époque qui commencera par les années de plomb au Maroc. Je souhaite raconter à travers ce roman, mon père en tant que militant pour un Maroc soucieux et garant de la liberté de chacun et comment des guerres d’egos et de courses à la chimère matérielle ont anéanti ce rêve.
Maintenant pour répondre à la deuxième question qui est plus compliquée, consciemment, je n’ai aucun but précis. Pour cela, il faudrait interroger l’inconscient qui pourrait avoir des pistes haha.

A.E : Une conclusion ? Une question que vous auriez aimé qu’on vous pose ?

N.Y.E : Tout d’abord, je voudrais vous remercier de l’intérêt que vous portez à mon écriture. C’est très agréable et très encourageant. Le lecteur est fondamental dans l’acte d’écrire, sans lui l’écrivain n’existerait pas c’est un constat bien connu.
Pour la question que j’aurais voulu que vous me posiez :

N’avez-vous pas peur d’écrire ?

La réponse aurait été : Oui terriblement.

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